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Histoire

pour tant de mérite, étoit capable de m’engager dans une autre passion : car il ne pouvoit me rester alors aucune espérance raisonnable, du côté de la Dame étrangere ; quoique les circonstances, où je me trouvois par rapport à elle, fussent une sorte de lien qui m’obligeoit d’attendre le succès de certains événemens. En faisant l’examen de mon cœur, je fus sérieusement allarmé d’y trouver les charmes de Miss Byron, déja trop bien établis pour ma tranquillité. L’honneur & la justice me déterminerent à faire tous mes efforts, pour arrêter une passion si vive. Mes affaires ne me laisserent pas manquer de prétexte pour de fréquentes absences, pendant que Miss Byron étoit à la campagne avec mes Sœurs. Osant à peine me fier à moi dans sa présence, je pris le parti de me livrer à divers soins, dont j’aurois pu me décharger sur le ministere d’autrui. Je reconnus plus d’une fois que ma compassion, pour certaines disgraces, n’auroit pas tenu long-temps contre les nouveaux sentimens de mon cœur, si ces disgraces, que je plaignois de la meilleure foi, avoient pu finir heureusement. Il ne m’étoit pas difficile, non plus, d’observer que mes Sœurs & Mylord L… qui ne savent rien de ma situation, auroient préféré Miss Byron, pour leur Sœur, à toutes les autres Femmes.

Quelquefois, je vous l’avoue, cet amour propre, cette vanité, qui n’est que trop naturelle aux caracteres vifs, me portoit à me