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du Chev. Grandisson

» Ma Fille ! car dans la tendresse & la joie de mon cœur, un nom si doux doit m’être permis ! ma Fille, la gloire de son sexe, n’ayant jamais rien eu de si respecté que sa Religion, de si précieux que son honneur, & de si tendrement aimé que sa Famille, vous proteste par ma bouche, qu’au fond de son cœur, où toute son attention s’est portée au premier instant de sa guérison, elle n’a trouvé que le goût & le plus saint exercice de ces trois devoirs. Sa mémoire même, qui se rappelle imparfaitement quelques circonstances de sa maladie, ne lui reproche point d’avoir rien mis en balance avec des objets si chers. Elle croit au contraire, que la seule crainte de les blesser a causé toutes ses peines. À des sentimens si purs, elle joint sans violence une parfaite soumission. Ainsi les Articles, que des idées mal conçues lui avoient fait regarder comme une faveur, s’évanouissent pour elle, & ne lui donnent aucun avantage qu’elle veuille conserver. Tout séjour lui devient égal avec sa Famille : le célibat & la vie religieuse ne lui paroissent plus les seuls états qu’elle puisse aimer. Quelque penchant qu’elle y ait encore, elle reconnoît que la volonté d’une Famille vertueuse est la plus sûre vocation d’une Fille ; & ses desirs n’ont plus d’autre regle. Si c’est au mariage qu’elle est destinée, elle se réduit à supplier qu’il soit différé d’un an ; moins pour sa propre satisfaction, que pour celle de sa Famille,