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Histoire

sang, si je l’avois cru possible à ce prix, y auroit été joyeusement employé. Mais, quoique j’eusse attendu quelque chose des Articles, & que j’en visse quelques heureux effets, mes espérances étoient encore éloignées ; lorsque j’observai, dans les entretiens qu’elle m’accordoit tous les jours, que son imagination paroissoit changer d’objet, & s’attacher fortement à de nouveaux soins. J’en augurai bien. Tout ce qui pouvoit la distraire de ses anciennes préventions, étoit favorable à sa santé. Connoissant tous les ressorts d’un cœur que j’ai formé dès l’enfance, il me fut aisé d’y pénétrer. J’obtins d’elle deux aveux, qui me causerent une joie fort vive, par la facilité qu’ils m’offroient d’augmenter la diversion de ses esprits, en fortifiant les nouvelles traces qui sembloient les attirer.

» Elle avoit su, me dit-elle, & par des avis certains, que la téméraire Olivia ne ménageoit point sa réputation. Madame Bémont, de qui lui venoit cette cruelle certitude, en étoit frappée jusqu’à s’être prévenue elle-même contre une malheureuse Amie, & l’avoir mortifiée par des comparaisons humiliantes. N’étoit-ce pas le comble de ses infortunes ? Elle me tint ce discours, les yeux baissés & mouillés de larmes.

» Loin de tourner mes efforts à la consoler, je pris le parti d’aggraver sa peine, & d’élargir la plaie de son cœur par mes plus graves réflexions. Ne doutez pas, répon-