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Histoire

la curiosité d’en entendre la lecture. Je ne fis pas difficulté de la satisfaire. Madame Bémont étoit présente. Nous ne fûmes point tentées, elle ni moi, de dire un mot d’application. Mais, pendant que je lisois, Clémentine changea plusieurs fois de couleur. Elle ne parut point du tout amusée par les saillies de Mylady G… quoiqu’elle admire la vivacité de son esprit. Elle tint continuellement les yeux baissés, dans le plus grave silence ; & lorsque j’eus achevé, elle soupira, elle tressaillit, comme revenant d’une méditation profonde, elle se leva, nous fit une révérence, & sortit, sans avoir ouvert une fois les levres sur le sujet.

Il étoit dix heures du matin. Je rencontrai, un moment après, l’Évêque, le Seigneur Jéronimo & leurs deux jeunes Cousins, qui s’étoient unis pour solliciter Sir Charles de se faire l’Avocat du Comte auprès d’elle. Je ne leur dis rien de ce qui venoit d’arriver, & j’acceptai la main du Seigneur Jéronimo, pour entrer avec eux chez Sir Charles. Ils le presserent beaucoup, en lui représentant qu’elle paroissoit tout-à-fait maîtresse d’elle-même ; que dans la solitude qu’elle cherche si constamment, elle balance sans doute en faveur du Comte, & que la moindre influence de sa part emporteroit la balance. Non-seulement il s’excusa, mais il les pria fort sérieusement de ne le plus solliciter sur ce point. N’y a-t-il pas beaucoup d’apparence, leur dit-il, que dans ses méditations solitaires, elle examine à quoi la