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Histoire

Ô Chevalier !

Devez-vous penser à disposer du droit d’autrui ? Vos Freres ne méritent-ils donc pas pour leur affection ces généreux sentimens que vous avez pour la cruauté de Daurana ? Loin, loin, ma chere Clémentine, cette sorte de tendresse qui fait chercher des excuses pour la barbarie, & pour tout ce qui blesse la raison & la nature !

Elle a soupiré. Les larmes ont inondé son visage. Après quelques momens de silence : ô Chevalier ! épargnez-moi. Vous, chere Mylady, ne me méprisez pas. L’affoiblissement de ma raison peut me conduire à l’erreur : mais lorsque mes yeux s’ouvrent, je n’y persévere point. Je vois que par rapport à mes Freres, je n’ai pas raisonné juste. Peut-être, à vos yeux, ma chere Mylady Grandisson, parois-je coupable d’un faux héroïsme. J’allois faire une injustice à mes Freres, pour faire plus que je ne dois en faveur d’une Parente éloignée.

Tout ce que Daurana peut espérer de vous, ma chere Clémentine, c’est que vous prêtiez la main, d’ailleurs, à lui faire recueillir un legs considérable que vos Grands-Peres lui ont laissé.

Et quel autre moyen que mon mariage ? Ah, Chevalier !

Telles sont, à la vérité, les suppositions. Telle étoit l’intention de vos deux Grands-Peres. Je ne fais, Mademoiselle, que vous le représenter. Je ne vous conseille rien.

Il ne demeure pas moins vrai, Monsieur,