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du Chev. Grandisson

voyant considérer avec impatience, elle m’a priée de l’ouvrir, sans quoi elle m’a menacée de se retirer. Je l’ai ouverte. Elle contenoit, lui ai-je dit, les plus tendres complimens pour elle & pour les autres Dames. Mais j’ai cru voir dans ses yeux un air d’empressement, qui m’a portée à lui en offrir la lecture : vous y trouverez, Mademoiselle, le plus obligeant des hommes. Sir Charles & moi, nous n’avons point de secret entre nous. Mais je vous préviens sur quelques endroits, qui regardent une personne… Peut-être ne la liriez-vous pas sans chagrin. Elle m’a répondu : est-ce là, Madame, votre seule objection ? Je serai bien aise, si vous l’approuvez, de voir comment le plus poli des hommes écrit à la plus aimable & la meilleure des Femmes.

Je lui ai donné la Lettre ; elle a eu la grandeur d’ame de prendre plaisir au style. Tendre délicatesse ! a-t-elle dit en lisant. Heureuse, heureuse Mylady Grandisson ! Les larmes aux yeux, & jettant ses bras autour de moi, c’est ainsi, a-t-elle continué, que je veux vous féliciter. Que je dois m’applaudir de n’avoir pas écouté ses offres ! Je n’aurois pu juger mal de la Religion d’un homme, qui est capable d’agir, de parler, d’écrire, & de vivre comme lui.

J’ai panché la tête sur son épaule. Lui exprimer la moitié seulement de l’admiration que je ressentois pour tant de noblesse, c’eût été lui rappeler son ancienne situation, &