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raison, c’est qu’avec autant de génie qu’il y en ait jamais eu dans un Climat ami des Lettres, elles y sont comme noyées dans les plaisirs sensuels. Le chant, la danse & la galanterie prennent tout leur tems. À considérer le peu de soin qu’on apporte à leur former le jugement, on s’imagineroit que leurs Maris & leurs Peres les regardent comme des enfans dans ce monde, qui n’ont aucune prétention à l’héritage de l’autre. Si la Religion ne leur donnoit pas de meilleures idées, elles pourroient se regarder elles-mêmes comme des Idoles passageres, proposées pour un tems à l’adoration des hommes. Cependant on remarque assez, dans leur commerce, de quoi elles seroient capables avec une autre éducation. La culture du Pays est aussi négligée que celle de l’esprit des Femmes. Le jardin du monde, comme on nomme l’Italie, est couvert de ronces ; & faute de soins, la richesse même du terroir en cause la maladie. Ces réflexions, ma chere Grand-Mere, ne sont point l’aveu direct de Clémentine ; car elle est passionnée pour son Pays, tel qu’il est. Je ne fais que les recueillir de ses diverses peintures. Mais tous nos Voyageurs éclairés en parlent comme je viens d’écrire.

Sir Charles est revenu à l’heure qu’il s’étoit prescrite. Il a raison de vouloir être par-tout ; car il fait le charme de toutes les Compagnies. Nous avons passé une des plus agréables soirées du monde ; & Clémentine, si malheureuse en elle-même, a trouvé la