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Histoire

Mylady Grandisson ! je n’ai jamais été qu’une Fille perverse. Tout ce que j’avois commencé à désirer, je n’étois pas tranquille, si je ne me croyois sûre de l’obtenir. Mon orgueil & mes caprices me coûtent cher. Mais, dans les derniers tems, n’ai-je pas été plus perverse que jamais ? J’avois conçu l’envie de venir en Angleterre ; je suis déja lasse de mon entreprise. L’Angleterre me déplaît, lorsque je n’y puis être à couvert. Mais, depuis des années entieres, j’étois remplie d’un autre projet : il m’occupoit seul ; il m’avoit aidé à faire le plus grand des sacrifices ; & je suis venue dans un lieu, presque le seul de l’Europe, où ce cher projet est impraticable. Que ne suis-je passée en France ? j’avois assez d’argent pour obtenir l’entrée du premier Couvent qui pouvoit s’offrir. Le tems de la profession seroit arrivé… Mais je crois qu’il n’est pas trop tard encore. Je veux partir. Aidez-moi, très-chere Sœur ! je ne puis soutenir la vue de ma Mere.

Sir Charles est entré alors. Mademoiselle, a-t-il dit d’un ton paisible, j’ai entendu ce qui vient de vous échapper. Calmez-vous, je vous en conjure. J’avois appréhendé de vous déclarer l’arrivée de vos Proches ; mais ne connoissez-vous pas leur indulgence ? Vous n’avez rien à craindre, & vous avez au contraire tout à vous promettre de leur présence.

Rien à craindre ! Et vous engagez-vous,