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Histoire

jeune Fille : mais on a ses pensées à tout âge. Je vous avouerai, Mme, que l’homme qui a passé quelques années avec Sir Charles Grandisson, qui a mérité son amitié par un caractere éprouvé… Elle s’est arrêtée.

Belcher, sans doute ?

Belcher, Madame. De tous les hommes que je connois, c’est le plus semblable à mon Tuteur. Mais il est homme fait ; & je suppose qu’il a vu quelques Femmes qu’il peut aimer.

Je ne le crois pas, ma chere.

Pourquoi ne le croyez-vous pas, Madame ?

Parce qu’à parler franchement, comme je souhaiterois que vous le fissiez avec moi, il me paroît marquer pour vous, toute jeune que vous êtes, un respect & des attentions extraordinaires.

C’est par considération pour mon Tuteur. Mais quoiqu’il en soit, si je conserve l’amitié de mon Tuteur & la vôtre, je n’aurai rien à desirer.

L’arrivée de son Tuteur, du mien, de mon Ami, de mon Amant, de mon Mari, & tous les noms chers ensemble, a terminé cette conversation. Je l’abandonne à votre jugement, ma très-chere Mme mais j’en conçois de fort grandes espérances.

LETTRE CX.

Mylady Grandisson, à la même.

3 Février.

J’eus hier un autre entretien avec Émilie. Elle avoit été plus sérieuse & plus grave qu’à l’ordinaire, depuis le dernier, dont je vous ai fait le récit.

Anne, sa Femme de Chambre, que vous connoissez, avoit observé du changement dans l’humeur de la jeune Maîtresse. Ne sachant plus, dit-elle, comment lui plaire, & voyant que, d’un des meilleurs naturels du monde, elle étoit devenue un des plus difficiles, elle avoit pris la liberté