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du Chev. Grandisson.

vant la date, il devroit être arrivé depuis quinze jours. Ainsi nous pouvons l’attendre à chaque moment.

Il marque que toute la Famille de Boulogne a plus d’ardeur que jamais, pour l’exécution de ses vues sur Clémentine, qui ne laisse pas de refuser encore les visites du Comte de Belvedere ; & sur ce point, ils se dispensent de la presser. M. Lowther semble craindre qu’il ne manque quelque chose à son rétablissement. Malheureuse Fille ! Il en juge par le desir qu’elle ne perd point, de faire un voyage en Angleterre. Elle a reçu, dit-il avec beaucoup de fermeté, la nouvelle du mariage de Sir Charles. Elle a demandé la bénédiction du Ciel, pour lui & pour la Compagne de son sort : mais depuis elle a paru sombre, réservée ; & quelquefois on l’a trouvée noyée dans ses larmes. Lorsqu’on lui en a demandé la cause, elle a repondu qu’elle appréhendoit le retour de la maladie. Les Médecins veulent absolument qu’on se hâte de la marier. On attend le Général pour presser la célébration. Mais elle demande qu’il lui soit permis encore une fois de traverser les Apennins, & d’aller passer quelques jours à Florence, avec sa chere Madame Bémont. Elle craint la vue du Général.

Que je suis touchée de sa situation ! Sir Charles ne doit pas l’être moins. Pourquoi n’attendent-ils pas du temps, ce grand Médecin de tous les maux, le succès d’un événement qu’ils ont tant à cœur ? M. Lowther ajoute que la santé du Seigneur Jéronimo se fortifie de jour en jour.

Que vous dirai-je de notre chere Émilie ! j’ai pitié d’elle. Je plains son jeune cœur, d’avoir si tôt éprouvé un amour sans espérance. Je voyois, il n’y a qu’un moment, ses yeux attachés sur le visage de son Tuteur, d’un air si passionné, qu’elle lui a fait baisser les siens. Il faut que je vous fasse, à cette occasion, le détail d’un entretien que j’ai eu avec elle, & dont la conclusion me fait espérer de la voir quelque jour heureuse.