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du Chev. Grandisson.

à faire au Diable. Il m’avertit d’un ton que je trouvai insultant, de me tenir mieux en garde. Je profitai du conseil sans m’en trouver mieux, car il savoit toutes les ruses du métier. Dans un instant je me vis sans armes, & ma vie fut au pouvoir de mon Adversaire. Il me rendit mon épée, en me conseillant de ne pas m’exposer à d’autres risques. Il remit la sienne au fourreau. Il me quitta. Je me trouvai dans une abominable situation, sans usage du bras droit. Je me dérobai comme un Voleur. Il monta dans son char de triomphe pour continuer sa route au Château de Selby. Je me retirai dans le mien, je maudis le monde entier, je me jettai à terre, & je la mordis.

Ce long & furieux récit impatientoit mon Oncle. Votre Frere paroissoit incertain, mais attentif. M. Greville a continué :

J’engageai Fenwick à m’accompagner le soir au rendez-vous. Manchot comme je l’étois, j’aurois souhaité de pouvoir l’irriter encore. Il ne voulut point être irrité ; & lorsque j’eus connu qu’il m’avoit ménagé au Château de Selby, lorsque je me souvins que je devois mon épée & ma vie à sa modération ; lorsque je me représentai son caractere, la conduite qu’il avoit tenue avec le Chevalier Pollexfen, & tout ce que Bagenhall m’avoit dit de lui ; pourquoi, pensai-je en moi-même, sans espoir comme je suis, soit qu’il vive ou qu’il meure, de réussir auprès de ma charmante Byron ; pourquoi m’obstiner contre un Ennemi si noble ? Cet homme est également incapable d’arrogance