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Histoire

miens, marquoient leur sensibilité. Il a repris, en baissant gracieusement la vue, & d’abord avec peu d’hésitation :

Je sens, Mesdames, que, refusé, comme la justice m’oblige d’en convenir, rejetté par Clémentine, quoique par les plus nobles motifs, j’ai fort mauvaise grace, & si-tôt après son refus, de faire l’offre de mon cœur à Miss Byron. Si je n’avois égard qu’à mon caractere, il auroit sans doute été plus louable de prendre du moins le temps que les loix prescrivent au veuvage ; mais lorsque la bienséance n’est pas négligée, les grandes ames, telles que les vôtres, sont au-dessus des formalités vulgaires. Pour moi, je ne fais aujourd’hui que déclarer une passion qui, sans un obstacle qui ne subsiste plus, auroit été la plus ardente dont le cœur d’un homme ait jamais brûlé. Je sais, Mademoiselle, que vous avez lu, vous & mes Sœurs, les Lettres que j’écrivois d’Italie : mes dernieres, & celles que j’ai laissées à Madame Sherley, n’ont dû vous laisser aucun doute de la constance de Clémentine dans sa glorieuse résolution. Celle-ci, que j’ai reçue depuis deux jours, (en la tirant de sa poche) & qui étoit écrite, comme vous le verrez, avant qu’on ait pu recevoir les miennes, vous fera voir que pour donner l’exemple à Clémentine, je suis pressé par toute la Famille, d’adresser mes vœux à quelque Dame de ma Patrie. C’est un motif qui m’oblige,