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du Chev. Grandisson.

ce qu’elle appelle mépris ; & c’est peut-être cette idée qui a changé son humeur, jusqu’à la rendre extrêmement sombre & rêveuse, après la vive agitation où nous l’avons vue.

Comme sa Mere me parloit assez bas, elle en parut affligée. Il n’est pas besoin, dit-elle, en s’adressant à moi, de me faire un secret de vos réflexions. Après des mépris ouverts, Monsieur, vous devez me croire capable de tout souffrir & de tout entendre : & se tournant vers la Marquise, Madame, vous voyez quelle est ma tranquillité. J’ai su me vaincre. Ne craignez point de vous expliquer devant moi.

Des mépris, très-chere Clémentine ! le Ciel & votre respectable Mere me sont témoins, que cet odieux sentiment n’est point entré dans mon cœur. Si les conditions que je propose étoient acceptées, elles me rendroient le plus heureux de tous les hommes.

Oui, oui, & moi la plus malheureuse de toutes les femmes : en un mot vous m’avez refusée. Et se cachant le visage de ses deux mains ; qu’on ne sache pas du moins, hors de cette Maison, qu’une Fille de la meilleure des meres, ait essuyé le refus de tout autre qu’un Prince. Quel mépris j’ai moi-même pour cette Fille ! Comment peut-elle paroître aux yeux de celui qui la méprise ? J’ai honte de moi ! en faisant quelques pas en arriere. Ô Madame Bemont, sans vous mon secret ne seroit jamais sorti