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du Chev. Grandisson.

Elle n’est pas plus mal, lui dit la Marquise ; mais son imagination est dans un trouble… Malheureuse fille ! Là-dessus, elle versa un torrent de larmes.

J’eus la hardiesse de prendre sa main. Ô Madame ! n’y a-t-il point de conciliation ! n’y a-t-il point…

Elle m’interrompit. Non, Chevalier ; la Religion n’en admet point. Il ne m’est pas permis d’en proposer. On connoît trop bien votre ascendant. Ma Fille ne sera pas long-tems Catholique, si nous consentons qu’elle soit à vous : & vous savez ce que nous penserions alors de son salut ! Il vaut mieux la perdre pour jamais… Cependant, comment une Mere… Ses larmes acheverent d’exprimer ce que la douleur fit demeurer sur ses levres. Lorsqu’elle eut retrouvé la voix ; Clémentine, reprit-elle, est en dispute avec son Chirurgien, pour se défendre de la saignée. Elle m’a demandé mon secours avec tant d’instance, que j’ai pris le parti de m’éloigner. Je crois l’opération finie. Elle sonna. Au même instant sa Fille parut elle-même, le bras lié, le visage pâle & troublé. Elle avoit senti la lancette, mais on n’avoit pu lui tirer que deux ou trois gouttes de sang ; & dans son effroi, elle venoit implorer l’assistance de sa Mere.

N. Ici M. Grandisson représente l’étonnement qu’elle eut de le voir, le calme qui succéda tout d’un coup dans son esprit, & la facilité qu’elle eut à se laisser tirer du