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du Chev. Grandisson.

la force ? L’exemple me vient de vous, qui êtes à mes yeux le plus grand des hommes. Mon devoir parle d’un côté ; mon cœur y résiste, & me tente d’une foiblesse. C’est toi, Dieu puissant ! que je prie de me soutenir dans ce grand combat. Ne permets pas qu’il renverse ma raison, comme il l’a déja fait ; cette foible raison, qui ne commence qu’à renaître ! Ô Dieu ! fortifie-moi ! L’effort est extrême. Il est digne de la perfection à laquelle Clémentine a toujours aspiré.

» Mon précepteur ! Mon Frere ! Mon Ami ! Ô le plus cher & le meilleur des hommes ! Ne pense plus à moi ! Je suis indigne de toi. C’est ton ame, qui a charmé Clémentine. Lorsque j’ai remarqué les graces de ta figure, j’ai retenu mes yeux, j’ai mis un frein à mon imagination : & comment ? en tournant mes réflexions sur les graces supérieures de ton ame. Mais cette ame, ai-je dit, n’est-elle pas faite pour une autre vie ? L’obstination, la perversité de cette ame si chere, permet-elle à la mienne de se lier à elle ? L’aimerai-je, jusqu’à souhaiter à peine d’être séparée d’elle dans son sort futur ? Ô le plus aimable de tous les hommes ! comment puis-je m’assurer que si j’étois à toi, la force de l’amour, la douceur des manieres, les complaisances de la bonté, ne m’entraînassent point après toi ? Moi, qui regardois autrefois un Hérétique comme le pire