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du Chev. Grandisson.

de discours, lorsque j’en parle moi-même ? Je remarque, dans Camille, cette affectation comme dans les autres. Jeronimo même n’en est pas exempt, & je l’ai mis plus d’une fois à l’épreuve. Seroit-il capable d’ingratitude ? Peut-il être indifférent pour un Ami, dont il a reçu tant de bienfaits ? Je me flatte qu’on n’a point assez mauvaise opinion de moi, pour craindre de hazarder, en ma présence, le nom d’un homme à qui je dois autant de reconnoissance que d’estime. Dites-moi, Madame, me seroit-il échappé, dans mes malheureux momens, quelque chose d’indigne de mon caractere, de ma Famille, ou de la modestie de mon sexe ? Si j’ai commis cette faute, mon cœur y renonce : il faut qu’en effet mon malheur ait été terrible.

Madame Bemont se hâta de la rassurer. Eh bien, reprit-elle, j’espere que la modestie & la reconnoissance seront toujours dans ce cœur, au même degré. Qu’il me soit permis d’avouer que je l’estime, car j’ai ce sentiment pour lui ; & jamais il ne me fera sortir de la décence. Permettez-vous, Madame ? Parlons de lui un quart d’heure ; pas plus. Voici ma montre. C’est une montre Angloise, que j’ai achetée dans ce dessein, sans que personne le sache. N’allez pas me trahir. Ici, se défiant de sa tête, elle laissa tomber une larme, & elle sortit en silence.

Je ne vous cacherai point, cher Ami,