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Histoire

barbarie ? L’aurois-je jamais pensé de ma Sœur Sforce ? Mais que ne peuvent l’Amour & l’Avarice, lorsque ces deux passions réunissent leurs forces ; l’une régnant dans le cœur de la Mere, & l’autre dans celui de la fille ? Hélas, hélas ! elles ont ruiné l’esprit de ma chere Clémentine. Le seul nom de Daurana lui cause de la terreur.

J’appréhende, mon cher Docteur, & je suis impatient tout à la fois de revoir l’objet de tant de larmes. Je souhaiterois qu’elle ne fût point accompagnée du Général. Ma crainte est de manquer de modération, s’il oublie la sienne. Je trouve dans mon cœur, que je n’ai pas mérité qu’on en use mal avec moi ; & que de mes Égaux sur-tout, ou de mes Supérieurs, je ne dois pas le souffrir. C’est un aveu que je vous fais avec confusion ; car cet orgueil étant un vice réel, il y a long-tems que je devrois l’avoir surmonté.

Mes plus tendres complimens à ceux pour qui vous me connoissez de l’affection. M. & Madame Reves sont du nombre. Je crois Charlotte heureuse. Si quelque chose manque à son bonheur, je suis persuadé que c’est sa faute. Dans l’égalité de ma tendresse pour mes deux Sœurs, qu’elle ne me donne pas sujet de dire que son Aînée est la meilleure, & par conséquent la plus aimable.

Olivia me cause de l’inquiétude. J’ai honte pour elle & pour moi, qu’avec sa naissance & ses bonnes qualités elle ait été