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Histoire

un mot de consolation ? Comment pouvez-vous la voir souffrir elle-même, le cœur plein, les yeux mouillés de pleurs, n’ayant pas la force de s’arrêter, & ne sachant néanmoins où porter ses pas, parce qu’elle ne peut rien apprendre de consolant à votre Pere affligé ? Comment le secret d’une si fâcheuse altération demeure-t-il impénétrable pour eux, qui tremblent de voir tourner le mal en habitude, & dans un tems où vous deviez couronner toutes leurs espérances !

Elle versa quelques larmes. Elle pencha la tête vers Camille, & elle s’appuya un moment sur son bras. Ensuite se relevant vers moi, quelle peinture vous me faites de mon obstination & de la bonté de ma Mere ! Je souhaiterois… Oui je souhaiterois, de toute mon ame, que ma cendre fût jointe à celle de mes Ancêtres ! Je faisois la consolation de ma Famille, & je vois que je n’en ferai plus que le tourment.

Ciel ! quel langage, Mademoiselle !

Ne me blâmez point. Rien ne me satisfait dans moi-même. Quel misérable Être, que celui qui ne peut supporter son existence !

Je ne me flatte pas, Mademoiselle, que vous preniez assez de confiance à votre quatrième Frere, pour lui ouvrir votre cœur. Ce que je vous demande uniquement, c’est de soulager celui de la meilleure des Meres, & de la mettre en état de rendre le même service au meilleur des Peres.