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du Chev. Grandisson.

placé vis-à-vis d’elles, les regarda plusieurs fois l’une après l’autre, comme s’il n’eût pu se rassasier du plaisir de les voir. Ensuite les prenant toutes deux par une main ; que de charmes ! leur dit-il. Avec quelle admiration je regarde mes Sœurs ! Il faut que les qualités de l’ame répondent à cette figure. Quel plaisir, quel orgueil je vais prendre dans mes deux Sœurs !

Chere Charlotte, dit alors Miss Caroline, en prenant l’autre main de sa Sœur, ne trouvez-vous pas dans les traits de mon Frere tout ce qu’on nous a dit de sa bonté ? De quoi me suis-je effrayée ? J’avoue, répondit Charlotte, que le cœur m’a manqué aussi. Je ne puis dire pourquoi. Mais nous avons tremblé… Oui, Monsieur, nous avons tremblé… Ô mon Frere ! nous n’avons jamais eu dessein de manquer au devoir. Elles versoient toutes deux un torrent de larmes.

Aimez votre Frere, leur dit-il ; aimez-moi toutes deux, comme je ferai mes efforts pour mériter votre affection. Les filles de ma Mere ne peuvent s’être écartées du devoir. Des méprises apparemment, de fâcheux malentendus ; chacun de nous n’a-t-il pas ses jours & ses ombres ? Jettons un voile respectueux… Il ne put achever. Il pressa successivement de ses levres les deux mains qu’il tenoit encore ; & s’étant levé il marcha vers la fenêtre, en tirant son mouchoir. Quelles idées purent lui causer cette émotion ! C’étoit