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Histoire

secours des hommes pour être folles. C’est la nature qui les a formées telles. Je n’en ai pas connu une, que l’expérience des autres ait rendue sage. Mais répondez-moi, Caroline. Dites. Puis-je recevoir de nouvelles propositions pour vous, ou ne le puis-je pas ?

[Miss Caroline ne répondit que par ses larmes.]

Sir Th. Une constance héroïque, apparemment. Ainsi vous sacrifiez une vertu réelle, l’obéissance que vous devez à votre Pere, aux idées romanesques de constance & de fidélité pour un Amant ? Approchez-vous de moi, mon amoureuse fille. Approchez-vous, dis-je, quand je vous l’ordonne.

[Miss Caroline se leva. Quatre pas, qu’elle fit en rampant, son mouchoir à ses yeux, la mirent à la portée des mains de son Pere. Il saisit brusquement une des siennes ; & lui faisant toucher sa manche, il l’attira jusqu’à ses genoux. Il tira son autre main, qu’elle avoit sur ses yeux. Le mouchoir tomba. Il ne lui étoit pas difficile de voir qu’elle avoit les yeux rouges & enflés de larmes. Elle auroit volontiers tourné la tête, pour cacher le désordre de son visage. Mais il lui tenoit fortement les deux mains ; & tout d’un coup il se mit à faire de grands éclats de rire.]

Sir Th. Eh ! De quoi pleure cette fille ? Consolez-vous, Caroline ; vous aurez un Mari. Je vous le promets. Je veux me hâter de vous conduire au grand marché de Londres. Vous serez étallée dans tous les lieux