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du Chev. Grandisson.

garde des aveux d’ingratitude & de méchanceté, signés de sa propre main, & des témoignages authentiques de la bonté de M. Jervins.

Il s’est levé en voyant le visage de sa Pupille inondé de larmes ; il lui a pris la main. Mais, mon Émilie, a-t-il continué, vous n’avez que des sujets de joie dans le souvenir de votre Pere. C’étoit un honnête homme, dans le sens le plus étendu de ce terme. À l’égard de sa femme, il n’a jamais eu qu’un défaut, qui est l’excès de son indulgence. Dirai-je, qu’après l’avoir vue plusieurs fois au pouvoir d’un autre, abandonnée, rejettée par des Amans aussi méprisables qu’elle, il ne fit pas difficulté de la reprendre ? Elle obtint de sa pitié ce qu’elle ne pouvoit plus attendre de son amour ; & dans cette humiliation même, elle n’en usa pas mieux avec un homme, auquel il étoit plus facile de pardonner que de punir. C’est avec douleur que je rappelle d’affreuses circonstances ; mais la mémoire de mon Ami, je le répéte, ne doit pas être blessée par des impostures. Combien de fois l’ai-je vu pleurer des excès de sa femme, pendant qu’elle en faisoit gloire ? Je ne condamne point vos larmes, chere Émilie ; mais je veux les essuyer.

Il a pris le mouchoir de sa Pupille, & lui en a tendrement essuyé les joues. J’en ai dit assez, a-t-il repris, pour la justification de votre Pere. Passons à d’autres en-