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Histoire

mon sort, malgré les heureuses espérances que je dois concevoir de mon nouveau mariage ? quelle autre attente sera la mienne, que celle d’une vie amere, & d’une mort que votre ingratitude ne manquera point de hâter. Une Mere n’a pas long-tems la force de soutenir les mépris de sa Fille ; & dans cette triste supposition, votre grande fortune ne vous mettra point à couvert des jugemens de Dieu. Mais j’espere mieux de mon Émilie, pour son indulgente & malheureuse Mere,

Hélène Ohara.

Miss Grandisson est venue à nous. Elle a serré dans ses bras la Pupille de son Frere ; & nous appelant ses deux amours, elle nous a fait rentrer dans la chambre voisine. Il m’a paru que Sir Charles avoit avoué, dans notre absence, la visite qu’il avoit reçue de M. & Madame Ohara, & qu’il se reprochoit de s’être laissé un peu emporter par son juste ressentiment. Miss Jervins lui a rendu la Lettre de sa Mere ; & tournant derriere lui, elle s’est appuyée sur le dos de son fauteuil, tandis que relisant la Lettre, il a fait quelques observations, dont je crois pouvoir me rappeler les termes.

« Une malheureuse Mere, dont les fautes ont été barbarement exagérées… » Le Pere de mon Émilie étoit un Mari fort indulgent. Il avoit pardonné à cette malheureuse femme des crimes que peu d’hommes se-