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Histoire

démêler avec Émilie. Seriez-vous venue pour m’apprendre que vous êtes mariée ?

Oui, Monsieur. Et vous ne m’en faites pas compliment ?

Compliment ? Madame. Je souhaite que vous méritiez d’être heureuse, & je ne doute point alors de votre bonheur. Mais pardonnez, s’il vous plaît. Mes Amis m’attendent.

J’avois peine à contenir mon indignation. Cette femme se marie, dit-on, deux ou trois fois tous les ans.

Hé bien, Monsieur, vous apprendrez peut-être ce que c’est que le major Ohara. Sachez de moi, dès aujourd’hui, qu’il est d’une des meilleures maisons d’Irlande, & qu’il ne souffrira point qu’on me dérobe ma fille.

Le major Ohara, Madame, n’a rien de commun avec la fille de mon malheureux Ami. Émilie est sous ma protection ; & je suis faché de vous dire qu’elle n’auroit pas eu besoin d’un secours étranger, si la personne qui prend le nom de sa Mere étoit plus propre à lui tenir lieu de l’excellent Pere qu’elle a perdu. Permettez, Madame, que je vous offre la main jusqu’à votre voiture.

Elle s’est emportée vivement, & dans des termes auxquels je la crois fort exercée. Elle m’a menacé du ressentiment de son Major Ohara ; & pour conclusion, elle m’a dit qu’il avoit été vainqueur dans une demie