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Histoire

m’avoit fait espérer, j’aurois pu trouver l’autre moitié de la somme pour un honnête intérêt. Je me suis fait une assez bonne réputation.

Mais si vous n’attendiez tous deux de votre Oncle, que chacun trois mille guinées, quel usage supposez-vous qu’il eût fait du reste de sa fortune ?

Nous avons jugé, m’a répondu M. Édouard, depuis qu’il devoit la vie à votre courage, qu’il vous feroit son principal Héritier. Nous ne nous sommes jamais flattés de recueillir toute sa succession ; & dans un voyage que j’ai fait en France, il m’a déclaré qu’il vous laisseroit la plus grande partie de son bien.

C’est une ouverture qu’il n’a jamais eue pour moi. Je n’avois fait que défendre ma vie, en garantissant la sienne. Il a toujours attaché trop de prix à mes services ; mais si votre Marchand vous avoit abandonné la moitié de son fonds, auriez-vous pensé, M. Édouard, à l’augmenter par un bon mariage ?

Les Femmes sont un fardeau, Monsieur ; si j’étois devenu mon maître, je n’aurois pas eu l’embarras d’en chercher. J’en aurois trouvé mille à choisir. Sa Sœur a paru fâchée de cette réponse. Son Frere n’en a pas été plus content. M. Sylvestre, qui est un vieux garçon, en a ri. Pour moi, elle m’a surpris à cet âge. Vrai langage de Marchand, ai-je dit en moi-même.