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Histoire

mon pouvoir d’y répondre. Quoi donc, mon Frere ? lui ai-je dit en le regardant. Non, a-t-il répété avec un soupir, il n’est pas en mon pouvoir d’y répondre.

Ô chere Lucie ! Qu’il s’est élevé ici de mouvemens dans mon cœur ! La fiévre est revenue, avec ses chaleurs & ses frissons. Elles m’ont promis de ne me plus tourmenter : mais il y a des sujets auxquels on ne peut toucher, sans causer une vive émotion à ceux qui sont partagés entre l’espérance & la crainte. Que l’incertitude est un tourment cruel ! Chaque instant de cette triste situation me tue.

Miss Grand. Mon Frere a continué : vous m’avez sondé plus d’une fois sur le même sujet. Je ne veux pas vous répondre, comme je le pourrois, que mon premier desir est de vous voir heureusement mariée, avant que de prendre aucun engagement pour moi-même. Mais, dans quelque tems, je serai peut-être en état de vous donner les explications que vous pouvez attendre d’un Frere. Ce qui nous cause de l’embarras, ma chere Henriette, c’est le terme de pouvoir, qu’il nous a répété ; & comme il nous a fait entendre qu’il ne peut répondre que dans quelque tems à notre question, nous craignons qu’il n’ait des vues sur quelque Dame Étrangère…

Elles avoient excité mes espérances ; & leur crainte faisant naître la mienne, elles ont été obligées, pour leur peine, de me