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Histoire

Je pense, comme Mylord, que le Capitaine Anderson, dans toute sa conduite, ne paroît pas digne de Miss Grandisson ; & réellement je connois peu d’hommes qui soient dignes d’elle. Si c’est partialité, elle est pardonnable dans un Frere.

[Miss Charlotte l’a remercié par une profonde inclination, & nous avons applaudi tous à un compliment qui lui rendoit le courage de lever la tête.]

Sir Ch. Je crois de même que si ma Sœur est sans estime pour lui, elle est en droit de lui refuser pour jamais sa main. Mais que dire de sa promesse ? Je conçois qu’elle s’y est laissée engager pendant la vie de mon Pere, qui avoit assurément le pouvoir de l’en dispenser. Cependant les efforts même, qu’elle a faits depuis, pour obtenir sa dispense de M. Anderson, montrent qu’elle se croit liée dans le fond du cœur.

[Il nous a regardés tous ; & chacun demeurant en silence, il a continué :]

Mylady juge que c’est en user indignement, que de vouloir la tenir liée par une promesse inégale. Mais où est l’homme, si vous ne le supposez extrêmement généreux, qui, se voyant en possession de quelque avantage sur une fille telle que Charlotte, [elle a rougi] ne tente point de le faire valoir ? Pourroit-il faire autrement, sans porter condamnation contre lui-même ? En un mot, peut-on penser que celui qui engage une femme à quelque promesse, n’ait pas dessein