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du Chev. Grandisson.

formations m’ont fait découvrir cette partie de son Histoire. Mais il m’avoit fait d’abord une autre peinture de sa situation. Une fort belle Terre, m’avoit-il dit, bien bâtie & bien plantée, quoique d’un revenu médiocre, faisoit le fonds de son bien, & ses espérances étoient considérables. On souffre d’autant plus impatiemment d’être trompé, qu’on est moins capable de tromper les autres. Je n’ai pu me défendre d’un souverain mépris pour M. Anderson, en reconnoissant qu’il m’en avoit si grossiérement imposé par des fables autant que par des Lettres, qu’il faisoit écrire pour lui ; & qu’il n’étoit ni le Seigneur d’une Terre, ni l’homme de sens & de savoir pour lequel il s’étoit fait passer.

Sir Ch. Mais comment se crut-il sûr de vous ?

Miss Grand. Ah, Monsieur ! Pendant qu’il soutenoit ces trompeuses apparences, il avoit arraché une promesse de ma main ; & dès qu’il se vit sur moi cet avantage, ce fut alors, ou bien-tôt après, qu’il m’écrivit de la sienne. Je fus ainsi convaincue qu’il avoit employé celle d’autrui, quoique nous fussions convenus d’un inviolable secret. Je tremblai de me voir exposée à l’indiscrétion de son Écrivain, qui m’étoit absolument inconnu, & qui devoit partager son mépris, entre l’Amant qui avoit besoin de son secours, & l’objet de cette indigne ruse. Cependant, je me dois ce témoignage, que mes Lettres étoient à l’épreuve de toute