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du Chev. Grandisson.

combien de lenteur & de répugnance elles m’ont parlé de ses défauts, & quelle satisfaction, au contraire, elles paroissoient prendre à relever ses bonnes qualités. Ô ! chere Lucie, combien n’en auroient-elles pas trouvé, à s’étendre sur les louanges d’un Pere, aussi bon, aussi supérieur que le mien à toutes sortes de foiblesses ! Qu’il est agréable pour des Enfans vertueux, de se rappeler les perfections de ceux auxquels ils doivent le jour !

Mylady Grandisson apporta un bien considérable à son Mari. Il avoit des talens distingués pour la Poésie, avec une passion extrême pour les cultiver. Quoiqu’héritier d’une si brillante fortune, ce fut à sa figure & à ses vers, qu’il dut la préférence que sa femme lui donna sur un grand nombre de Concurrens. Il n’avoit pas néanmoins autant de jugement qu’elle. Sir Thomas étoit Poëte ; & j’ai entendu dire que cette qualité demande une imagination ardente, qui nuit quelquefois au jugement. Mylady ne se détermina point en sa faveur, sans le consentement de sa famille ; mais on m’a fait entendre que ses Parens n’y consentirent, que par complaisance pour son choix. L’essor que Sir Thomas avoit pris, en succédant aux richesses de son Pere, faisoit juger à tout le monde qu’il étoit propre à les diminuer.

Cependant, il fut ce qu’on appelle un bon Mari. Son esprit, sa politesse, & l’am-