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Histoire

jeu, pour lequel il avoit de l’aversion : mais il donna dans un autre excès, qu’il appelloit un vice plus noble. Il se faisoit honneur d’avoir les plus beaux chevaux du Royaume & la plus belle meute ; dépense qu’il portoit jusqu’à la profusion. Son Pere, aussi resserré que le Fils étoit prodigue, avoit employé toute sa vie à grossir son bien. Sa succession consistoit en six mille livres sterling de rentes, formées de plusieurs belles terres dans le Royaume ; & près de deux mille en Irlande, avec beaucoup d’argent dans ses coffres. La femme de Sir Thomas étoit d’une naissance distinguée, Sœur de Mylord W… C’étoit la meilleure de toutes les femmes. J’ai pris plaisir au témoignage que ses deux Filles rendoient à sa bonté & à leur propre mérite, par l’abondance de leurs larmes. Il étoit impossible que le caractere d’une si vertueuse Mere ne me rappellât point le souvenir de la mienne, & je n’ai pu m’empêcher de joindre mes larmes à celles que je voyois répandre. Miss Jervin a pleuré aussi, non-seulement par tendresse & par sympathie, mais, comme elle nous l’a confessé, parce qu’elle n’a pas les mêmes raisons de se réjouir de la vie de sa Mere, que nous avons de pleurer celles que nous avons perdues.

Ce que j’ai à dire de plus, de Sir Thomas Grandisson, est sorti par intervalles, & comme à regret, de la bouche des deux Sœurs. Je n’ai pas observé sans plaisir avec