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Miss Clarisse Harlove, à Miss Howe.

mardi au soir, 16 de mai. Monsieur Lovelace vient de m’envoyer, par Dorcas, le mémoire suivant. " je me sers de ma plume, non-seulement pour épargner votre délicatesse, et pour vous obéir, mais pour vous mettre en état de communiquer mes idées à Miss Howe, qui pourra consulter, dans cette occasion, ceux d’entre ses amis à qui vous jugerez à propos d’accorder votre confiance ; je dis votre confiance, parce que j’ai fait entendre, comme vous le savez, à d’autres personnes, que nous sommes actuellement mariés. En premier lieu, chère miss, j’offre de vous assurer la jouissance particulière de votre propre terre, et d’y joindre quatre cens livres sterling annuelles sur le bien que j’ai dans le comté de Lancastre, qui vous seront payées par quartier pour votre propre et seul usage. Le fond de mon revenu est de deux mille livres sterling. Milord M propose de me céder, le jour de notre mariage, ou sa terre de Lancastre, à laquelle je puis dire, en passant, que je crois avoir plus de droit que lui ; ou celle de Médian, dans le comté de Hertfort, et de mettre celle que je choisirai sur le pied de mille livres sterling annuelles. Un excès de mépris pour l’opinion des hommes a souvent exposé ma conduite à de mauvaises interprétations. Je dois par conséquent vous assurer, en homme d’honneur, qu’aucune partie de mon bien n’a jamais été engagée, et que, malgré la dépense excessive que j’ai faite dans les pays étrangers, je compte d’être acquitté au terme prochain, de tout ce que je dois au monde. Tous mes principes ne sont pas condamnables. On m’a cru généreux dans ma dépense ; je ne me serais pas jugé digne de ce nom, si je n’avais commencé par être juste. Comme votre terre est actuellement entre les mains de votre père, si vous souhaitez que je vous assigne le même revenu sur les miennes, vos volontés là-dessus seront ma règle. J’engagerai milord M à vous marquer de sa propre main ce qu’il a dessein de faire pour nous, sans qu’il paroisse que ce soit vous qui le désiriez, et pour faire voir seulement qu’on ne prétend tirer aucun avantage de la situation où vous êtes à l’égard de votre famille. Pour faire éclater ma parfaite considération, je vous laisserai la disposition libre de toutes les sommes provenues de la succession de votre grand-père, et du revenu accumulé de votre bien, qui doit être entre les mains de votre père. Je ne doute pas qu’il ne vous fasse là-dessus des demandes considérables. Vous aurez le pouvoir de les accorder, pour votre propre tranquillité. Le reste sera remis entre vos mains. Vous en ferez l’usage auquel vous serez portée par ces généreuses inclinations qui vous ont fait tant d’honneur dans le monde, et pour lesquelles vous n’avez pas laissé d’essuyer quelques censures dans votre famille. à l’égard des habits, des diamans et des autres ajustemens de cette nature ; mon ambition sera que, pour en avoir de convenables à votre rang, vous n’ayez point obligation à ceux qui ont eu la stupidité d’abandonner une fille dont ils ne sont pas dignes. Il me semble, chère miss, que vous ne devez pas vous offenser de cette réflexion. Vous douteriez