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Cependant il m’a fort importunée ; et je n’ai pu l’empêcher de m’amener deux fois M Mennell, qui est venu de la part de Madame Fretchville, pour m’entretenir de la maison. Si j’étais obligée de faire la paix avec lui, je ne me croirais propre qu’à me causer sans cesse du mal à moi-même. à l’égard de ses crimes nouvellement découverts, et du conseil que vous me donnez de me procurer quelqu’une de ses lettres et de m’attacher Dorcas, ces soins demanderont plus ou moins d’attention, suivant les espérances que je recevrai du côté de mon oncle. La continuation des infirmités d’Hannah me chagrine beaucoup. Ayez la bonté, ma chère, de vous informer, pour moi, si sa situation ne l’expose pas à quelque besoin. Je ne fermerai pas cette lettre jusqu’à demain ; car je suis résolue d’aller à l’église, autant pour remplir mon devoir, que pour essayer si j’ai la liberté de sortir quand il me plaît, sans être accompagnée. Dimanche, 14 de mai. Il ne m’a pas été possible d’éviter un petit débat avec M Lovelace. J’avais donné ordre qu’on fît venir un carrosse à la porte. Apprenant qu’il y étoit, je suis descendue de ma chambre pour m’y rendre ; mais j’ai rencontré Lovelace, un livre à la main, sans épée et sans chapeau. Il m’a demandé d’un air fort grave, quoique respectueux, si j’allais sortir. Je lui ai dit que c’était mon dessein. Il m’a priée de permettre qu’il m’accompagnât, si j’allais à l’église. Je l’ai refusé. Il s’est plaint amèrement de la manière dont je le traite ; et, pour le monde entier, m’a-t-il dit, il ne voudrait pas avoir une seconde semaine à passer, telle que la dernière. Je lui ai confessé naturellement que j’avais fait quelque démarche du côté de ma famille, et que j’étais résolue de ne voir personne jusqu’à ce que j’en eusse appris le succès. Il a rougi. Il a marqué de l’étonnement. Mais, étouffant quelque chose qu’il paroissait prêt à dire, il m’a représenté à quoi j’allais m’exposer de la part de Singleton, et combien je devais craindre de sortir sans être accompagnée. Ensuite il s’est plaint de Madame Fretchville, qui souhaite de passer quinze jours de plus dans sa maison. Elle voit, m’a-t-il dit, que j’ai peine à me déterminer pour conclure ; et qui sait sur quoi l’on peut compter avec une femme si vaporeuse ? Cette semaine, mademoiselle, est assurément bien malheureuse. Si je n’étais pas si mal dans vos bonnes grâces, vous seriez maîtresse à présent de cette maison ; et vraisemblablement vous y auriez déjà ma cousine Montaigu, ou ma tante même, avec vous. Ainsi, monsieur, lui ai-je répondu, votre cousine ne peut donc venir chez Madame Sinclair ? Quelles sont, je vous prie, ses objections contre Madame Sinclair ? Une maison, dans laquelle vous croyez que je puis passer un mois ou deux, ne convient-elle à aucune de vos parentes pour quelques jours ? Et puis, que dois-je penser du retardement de Madame Fretchville ? Là-dessus, je l’ai poussé, pour me faire un passage, et j’ai continué de marcher vers la porte. Il a appelé Dorcas pour se faire apporter son épée et son chapeau ; et se hâtant de marcher devant moi, il s’est placé entre moi et la porte. Là, il m’a suppliée encore de lui accorder la permission de m’accompagner.