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la vallée qui s’offrait à ses pieds. Là, fixant ses regards sur Londres, elle a porté son mouchoir à ses yeux ", se repentant, peut-être, de la démarche téméraire où elle s’est engagée, et souhaitant de pouvoir retourner sur ses pas. Je le répète, Belford, c’est le meilleur parti qu’elle puisse prendre. Malheur à la fille qui, après avoir pensé à devenir ma femme, sera capable de me fuir et de renoncer pour jamais à moi ! " ensuite, s’étant remise à marcher, elle s’est encore arrêtée : comme si la route avait commencé à lui déplaire ; après avoir recommencé à pleurer, elle est retournée vers Hamstead ". Je suis ravi qu’elle ait tant pleuré ; parce que, dans les plus grands chagrins, un cœur qui reçoit ce soulagement, devient capable de résister à la douleur. Delà vient que je n’ai jamais été fâché de voir une belle femme en pleurs. Combien de fois n’ai-je pas souhaité, depuis hier après midi, de pouvoir pleurer à chaudes larmes ? " bientôt, elle a vu venir vers elle un carrosse vide, à quatre chevaux. Elle a quitté le sentier qu’elle suivait pour aller à sa rencontre ; dans le dessein apparemment de parler au cocher, s’il s’était arrêté pour lui faire les premières questions. Il l’a regardée attentivement. Mais tous les passans lui payaient cette espèce de tribut : ce qui servait à lui rendre l’espion moins suspect ". Heureux coquin que ce cocher, s’il avait sçu qui il pouvait obliger, et quel prix on aurait attaché à ses services ! Mais quel malheur aurait été le mien, si sa stupidité ne m’avait été aussi favorable que mon étoile ! " en un mot, il paraît qu’ils ont manqué tous deux de résolution. Les chevaux suivant la route, le cocher a tourné plusieurs fois les yeux derrière lui ; tandis que, regrettant l’occasion qui s’éloignait, elle a poussé des soupirs ; elle a recommencé à verser des larmes, qui ont été observées par l’espion. étant rentrée dans Hamstead, elle regardait au visage chaque personne qu’elle rencontrait ; et poussant quelquefois son haleine sur sa main, elle l’appliquait sur ses yeux, pour en dissiper la rougeur, ou pour sécher ses larmes. Enfin, la vue d’un écriteau qui offrait des logemens à louer, l’a fait avancer et retourner plusieurs fois, comme incertaine du parti qu’elle devait prendre. Elle n’a pas laissé de passer au-delà de cette maison ; et l’espion, arrêté alors par quelques gens de sa connaissance, l’a perdue de vue pendant quelques minutes. Mais il l’a bientôt vue sortir d’une boutique, accompagnée d’une servante, qu’elle avait engagée, comme l’effet l’a prouvé, à la conduire dans la maison où elle est actuellement logée. Ne la voyant point reparoître, après l’avoir attendue plus d’une heure, il est revenu à l’hôtellerie, pour faire son récit à ceux qui l’avoient employé ". Le mien, Belford, est du genre dramatique. Ainsi, regarde ce que tu as lu jusqu’ici, comme le premier acte. Mon valet, qui entre sur la scène, va commencer le second. Il s’était procuré toutes ces informations avant mon arrivée, par le soin qu’il avait eu de raconter, en échange, diverses particularités dont j’ai chargé depuis long-temps sa mémoire, en les lui répétant de bouche et par écrit. Ainsi, j’ai trouvé les gens de cette maison dans mes intérêts. Ils m’ont répété tout ce qu’il leur avait dit, avec des souhaits pour le succès de mon entreprise. Mais il a commencé par me rendre compte de l’idée qu’il leur avait fait prendre de ma belle et de moi. C’est un détail dont il est nécessaire