Page:Richardson - Clarisse Harlove, II.djvu/214

Cette page n’a pas encore été corrigée

vous demande la permission de vous dire que j’insiste sur son exécution. Souvenez-vous, très-chère Clarisse, qu’une faute n’est pas justifiée par l’exemple. C’est manquer de délicatesse que de la pousser à l’excès. Je ne puis rien me reprocher qui mérite un ressentiment si vif. Il est vrai que la violence de ma passion peut m’avoir emporté au-delà des bornes ; mais, s’il m’est permis de le faire valoir, l’empire que j’ai pris sur moi, pour vous obéir, mérite un peu de considération. Vous me défendez de paraître devant vous pendant toute une semaine. Si vous ne me pardonnez point avant le retour du capitaine Tomlinson, qu’aurai-je à lui dire ? Je vous demande encore une fois, un moment d’entretien dans la salle à manger. En vérité, madame, il est nécessaire que je vous voie. J’ai besoin de vous consulter sur la permission ecclésiastique, et sur d’autres points de la même importance. Comment les expliquer au travers d’une porte, lorsque les femmes de la maison nous croient mariés ? Au nom du ciel, accordez-moi votre présence pour quelques instans. Je vous laisse en liberté le reste du jour. Si je dois obtenir grâce, suivant votre promesse, vous vous épargnerez des peines en cessant de la différer. Vous en épargnerez de mortelles au plus affligé de tous les hommes. à Monsieur Lovelace.

votre obstination à me chagriner ne changera rien à mes résolutions. J’ai besoin de tems pour considérer si je ne dois pas renoncer absolument à vous. Dans la disposition où je suis actuellement, mon sincère désir est de ne vous revoir jamais. S’il vous reste quelque ombre de faveur à vous promettre de moi, vous ne la devez qu’à mes espérances de réconciliation avec mes véritables protecteurs. Ne me parlez pas des suites, elles ne me touchent plus. Je me hais moi-même. à qui dois-je d’autres sentimens ? N’est-ce pas à l’homme qui est capable d’avoir formé un noir complot pour déshonorer ses propres espérances, et pour couvrir d’opprobre une fille infortunée, après lui avoir fait perdre l’estime et l’affection de tous ses amis ? à Madame Lovelace.

madame, je vais de ce pas à l’officialité, et je continuerai sur chaque point, comme si je n’avais pas le malheur de vous avoir déplu. L’unique réflexion sur laquelle j’insiste, c’est que, malgré la faute où je me suis laissé emporter par l’excès de ma passion, l’obéissance que j’ai eue pour vos ordres dans un moment où peu d’hommes auraient été capables de cet effort sur eux-mêmes, m’autorise à vous demander l’exécution de cette promesse solemnelle que vous avez accordée à ma soumission. Je pars avec l’espérance de vous trouver, à mon retour, dans une disposition plus favorable, et j’ose dire plus juste. Soit que la permission ecclésiastique me soit accordée ou non, je vous demande en grâce que demain soit le jour qu’il vous a plu de nommer bientôt . Il expiera toutes les fautes, en me rendant le plus heureux des hommes. Les articles sont prêts, ou le seront ce soir. Que le ressentiment, madame, ne vous jette pas dans un chagrin si peu proportionné à l’offense. Ce serait nous exposer tous deux à l’étonnement de nos hôtesses ; et, ce qui est beaucoup