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facilement. Au reste, si ce langage couvre quelque vue, (que ma belle a tremblé ici, comme elle m’en a fait l’aveu !) je réponds seulement que cette maison est un lieu privilégié. C’est à présent ma demeure, et par conséquent un asile sacré pour quiconque me fait l’honneur d’y venir, dans quelque vue qu’il y vienne. " je ne crois pas, monsieur, avoir donné occasion à ce discours. Mais je ne ferai pas difficulté de vous voir dans tout autre lieu, si je vous importune ici. On m’avait averti que j’aurais affaire à un jeune gentilhomme plein de feu. Comme je me rends témoignage de mes intentions, et que la commission que j’ai acceptée est d’une nature paisible, je n’en ai pas été plus refroidi. J’ai deux fois votre âge, M Lovelace, j’ose le dire. Mais je vous assure que si mon message, ou la manière dont je l’exécute, a quelque chose d’offensant pour vous, je puis suspendre mon entreprise un jour ou deux, et pour toujours, si vous le désirez. Ainsi, monsieur, quelque jour qu’il vous plaise de choisir, vous serez le maître de me faire savoir vos intentions… " (il allait me dire sa demeure, mais je l’ai interrompu.) capitaine Tomlinson, vous répondez fort bien. J’aime les caractères fermes. N’êtes-vous pas officier de guerre ? " je l’ai été, monsieur. Mais j’ai converti mon épée en un soc de charrue , pour parler le langage de l’écriture ; et depuis quelques années, j’ai fait toutes mes délices de cultiver le bien de mes pères. Un homme de cœur, M Lovelace, me plaît autant que jamais. Cependant, permettez-moi de vous dire que, lorsque vous serez à mon âge, vous penserez qu’il n’y a pas autant de vrai courage dans une chaleur de jeunesse, que vous semblez y en trouver à présent. " (qu’en dis-tu, Belford ? Ce n’est pas un sot que ce Tomlinson. Il a gagné tout-à-la-fois l’attention et le cœur de ma charmante. Quel bonheur, a-t-elle dit, qu’il y ait des hommes capables de se posséder dans la colère !) fort bien, capitaine. Reproche pour reproche. Nos points sont égaux. Donnez-moi donc à présent le plaisir d’entendre votre commission. " volontiers, monsieur, pourvu que vous me permettiez de répéter ma demande. êtes-vous marié réellement et de bonne foi à Miss Clarisse Harlove, ou ne l’êtes-vous pas ? " rien de plus clair, capitaine. Mais si je vous réponds que je suis marié, qu’aurez-vous à dire ? " je dirai, monsieur, que vous êtes homme d’honneur. " oui, capitaine, c’est ce que je crois être, soit que vous le disiez ou que vous ne le disiez pas. " je serai sincère, monsieur, dans tout ce que j’ai à vous expliquer là-dessus. M Jules Harlove a découvert depuis peu que vous êtes logés dans la même maison, vous et sa nièce ; que vous étiez ensemble à la comédie, il y a sept ou huit jours. Il se flatte que vous êtes mariés. On l’a même confirmé dans cette opinion ; mais comme il vous connaît d’un caractère entreprenant, et que vous avez déclaré du dédain pour une alliance avec sa famille, il souhaite que je tire de votre propre bouche la confirmation de votre mariage, avant que de s’engager dans les démarches qu’il est disposé à faire en faveur de sa nièce. Vous conviendrez, M Lovelace, qu’il n’aurait pas lieu d’être satisfait d’une réponse qui lui laisserait le moindre doute. " il