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cherché un asyle dans sa famille, et que cette raison ne devienne point un obstacle à ma réconciliation : que je ferai venir, pour me servir, Hannah, mon ancienne femme de chambre, et que Miss Howe sera seule dans le secret de ma retraite ; que, pour lui, il me quittera sur le champ, pour se rendre à Londres, ou dans quelque terre de son oncle ; et que, se bornant, comme il l’a promis, à un simple commerce de lettres, il n’approchera point de moi sans ma permission. " que, si je me trouve dans le danger d’être découverte, ou enlevée par la force, je me jetterai alors sous la protection de celle de ses deux tantes qui voudra me recevoir ; mais dans le cas seulement d’une nécessité absolue, parce qu’il sera toujours plus avantageux, pour ma réputation, d’employer du fond de ma retraite une seconde ou une troisième main pour me réconcilier avec mes amis, que de traiter avec eux d’une manière éclatante. " que je ne veux pas néanmoins lui déguiser que, si dans ce traité mes amis insistent sur l’exclusion absolue de ses espérances, je m’engagerai à les satisfaire ; pourvu que, de leur part, ils me laissent la liberté de lui promettre qu’aussi long-temps qu’il sera au monde sans prendre d’un autre côté les chaînes du mariage, je n’accepterai point la main d’un autre homme : que c’est un retour auquel je suis portée d’inclination pour toutes les peines qu’il s’est données et pour les mauvais traitemens qu’il a soufferts à mon occasion ; quoiqu’il doive se rendre grâces à lui-même et au peu d’égard qu’il a toujours eu pour sa réputation, des témoignages de mépris qu’il a reçus de ma famille. " je lui dis que, dans cette retraite, mon dessein est d’écrire à M Morden, et de lui inspirer, s’il est possible, du zèle pour mes intérêts. " j’entre dans quelque explication sur ces alternatives. " vous jugez bien, ma chère, que cette malheureuse rigueur qu’on a pour moi, et ce projet de fuite, me mettent dans la nécessité de lui rendre compte, bien plutôt que mon cœur ne me le permettrait, de toutes les circonstances de ma conduite. " il ne faut pas s’attendre, lui dis-je, que Madame Howe veuille s’attirer des embarras, ni qu’elle souffre que sa fille ou M Hickman s’en attirent à mon occasion. Quant au voyage de Londres, qu’il me propose, je ne connais personne dans cette grande ville ; et j’en ai d’ailleurs une si mauvaise opinion, qu’à moins que dans quelque temps les dames de sa famille ne m’engagent à les y accompagner, il n’y a point d’apparence que je goûte jamais cette idée. Je n’approuve pas non plus l’entrevue qu’il me demande, sur-tout lorsqu’il est vraisemblable que je le verrai bientôt. Mais s’il arrive quelque nouvel évènement qui me fasse abandonner le dessein de partir, je pourrai me procurer l’occasion de l’entretenir, pour lui expliquer les raisons de ce changement. " vous concevrez, ma chère, pourquoi je n’ai pas fait scrupule de lui donner cette espérance : c’est dans la vue de lui inspirer un peu de modération, si je change en effet de pensée. D’ailleurs, vous vous souvenez qu’il n’y eut rien à lui reprocher, lorsqu’il me surprit il y a quelque tems dans un lieu fort écarté. " enfin, je me recommande à son honneur et à la protection de sa tante, comme une personne infortunée qui n’a pas d’autre titre. Je répète (assurément du fond du cœur !) combien il m’est douloureux de me voir