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une jeune personne du mien, lorsqu’elle se contient dans l’humble disposition où je suis. " après les étranges explications qu’on a données à ma lettre précédente, je dois craindre que celle-ci ne soit encore plus mal reçue. Mais je vous supplie, monsieur, de faire deux mots de réponse à ma proposition, quelque sévères qu’ils puissent être. Je pense encore qu’elle mérite quelque attention. Je m’engagerai, de la manière la plus solemnelle, à lui donner de la validité par un renoncement perpétuel au mariage. En un mot, je ferai tout ce qui n’est pas absolument impossible, pour rentrer en grâce avec tout le monde. Que puis-je dire de plus ? Et ne suis-je pas, sans le mériter, la plus malheureuse fille du monde ? " Betty a fait encore difficulté de porter cette lettre, sous prétexte que c’était s’exposer à recevoir des injures et à me la rapporter en pièces. Je voulais en courir les risques, lui ai-je dit, et je lui demandais seulement de la remettre à son adresse. Pour réponse à quelques insolences dont elle s’est crue en droit de me faire payer ce service, je l’ai assurée qu’elle aurait la liberté de tout dire, si elle voulait m’obéir cette fois seulement ; et je lui ai recommandé de se dérober aux yeux de mon frère et de ma sœur, de peur que leurs bons offices n’attirassent à ma lettre le sort dont elle me menaçoit. C’est de quoi elle n’osait répondre, m’a-t-elle repliqué. Mais enfin elle est descendue, et j’attends son retour. Avec si peu d’espérance de justice ou de faveur, j’ai pris le parti d’ouvrir la lettre de M Lovelace. Je vous l’enverrais, ma chère, avec toutes celles que je vais réunir sous une même enveloppe, si je n’avais besoin d’un peu plus de lumières pour me déterminer sur la réponse. J’aime mieux prendre la peine de vous en faire l’extrait, tandis que j’attends le retour de Betty. " il me fait ses plaintes ordinaires de la mauvaise opinion que j’ai de lui, et de la facilité que j’ai à croire tout ce qui est à son désavantage. Il explique, aussi clairement que je m’y suis attendue, ma réflexion sur le bonheur que ce serait pour moi, dans la supposition de quelque entreprise téméraire contre M Solmes, d’être délivrée tout à la fois de l’un et de l’autre. Il se reproche beaucoup, me dit-il, d’avoir donné à la crainte de me perdre, quelques expressions violentes dont il convient que j’ai eu raison de m’offenser. " il avoue qu’il a l’humeur prompte. C’est le défaut, dit-il, de tous les bons naturels ; comme celui des cœurs sincères est de ne le pouvoir cacher. Mais il en appelle à moi sur sa situation. Si quelque chose au monde est capable de faire excuser un peu de témérité dans les expressions, n’est-ce pas l’état auquel il se trouve condamné par mon indifférence et par la malignité de ses ennemis ? " il croit trouver, dans ma dernière lettre, plus de raison que jamais d’appréhender que je ne me laisse vaincre par la force, et peut-être par des voies plus douces. Il n’entrevait que trop que je le prépare à ce fatal dénouement. Dans une idée si affligeante, il me conjure de ne me pas prêter aux noires intentions de ses ennemis. Les vœux solemnels de réformation, les promesses d’un avenir digne de lui et de moi, et les protestations de vérité, ne manquent pas de suivre, dans le style le plus soumis et le plus humble. Cependant il traite de cruel le soupçon qui m’a fait attribuer toutes ses protestations au besoin qu’il en croit avoir lui-même, avec une si mauvaise renommée ". Il