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pour moi. Vous savez fort bien, que nous n’avons que votre avantage à cœur, pourvu qu’il s’accorde, à la vérité, avec l’avantage et l’honneur de toute la famille. Que faudrait-il penser de celui d’entre nous qui ne chercherait pas le bien commun, et qui voudrait aimer une partie contre le tout ? Dieu nous en préserve ! Vous voyez que je suis pour tout le monde. Que m’en reviendra-t-il, de quelque manière que les choses puissent tourner ? Ai-je besoin de richesses ? Mon frère Jules ne peut-il pas dire de même ? Et puis, ma nièce Clary, songez à ce qui vous en arriveroit. Si vous pouviez seulement aimer M Solmes ! Mais vous ne savez pas, vous dis-je, de quoi vous êtes capable. Vous vous encouragez dans votre dégoût. Vous permettez à votre cœur de se refuser… je vous assure, que je ne l’aurais jamais cru aussi avancé qu’il est. Faites un effort sur lui, ma nièce, et repoussez-le aussi vîte qu’il recule. C’est ce que nous faisons, nous autres, à l’égard de nos matelots et de nos soldats, dans nos combats de mer, sans quoi, nous ne vaincrions jamais. Nous sommes tous certains que vous remporterez la victoire ; pourquoi ? Parce que vous le devez. Voilà ce que nous pensons, de quelque manière que vous en pensiez vous-même. Et de qui vous imaginez-vous que les pensées doivent avoir la préférence ? Il se peut que vous ayez plus d’esprit que nous ; mais si vous êtes plus sage, il est donc bien inutile que nous ayons vécu trente ou quarante ans plus que vous. Cette lettre est aussi longue que la vôtre. Peut-être n’est-elle pas écrite si vivement, ni dans un style aussi poli que celui de ma nièce ; mais je suis persuadé que la force des argumens est de mon côté, et vous m’obligerez extrêmement, si vous nous faites connaître, par votre soumission à tous nos désirs, que vous en êtes persuadée aussi. Si vous n’en faites rien, vous ne devez pas compter de trouver en moi un avocat, ni même un ami, quelque chère que vous me soyez ; car ce sera même un sujet de chagrin pour moi, d’avoir la qualité de, votre oncle, Antonin Harlove. Mardi, à deux heures après minuit. p s. vous ne devez plus m’écrire que pour m’apprendre votre soumission. Mais je m’imagine que cette défense est inutile, car je suis sûr que mes argumens sont sans réplique. Je sais qu’ils le sont. Aussi ai-je écrit nuit et jour depuis dimanche au matin, à l’exception des heures de l’église, et autres temps pareils. Mais cette lettre, je vous le dis, est la dernière de la part de A H.



Miss Clarisse Harlove, à Miss Howe.

mardi, 16 mars. Après avoir trouvé si peu de faveur auprès de ma famille, j’ai pris une résolution qui vous surprendra. Ce n’est rien moins que d’écrire à M Solmes même. Ma lettre est partie, et je viens de recevoir la réponse. Il faut qu’on l’ait aidé, car j’ai vu un autre de ses écrits, dont le style était assez pauvre et l’orthographe misérable. Pour l’adresse, je la crois de lui ; et vous le reconnaîtrez à cette marque. Je mets sous mon enveloppe une lettre que j’ai reçue de mon frère ; à l’occasion de celle que j’ai écrite à M Solmes. Je m’étais figuré qu’il n’était pas impossible de faire perdre à