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bonne compagnie si cela est ; et c’est ma consolation : j’étais d’avis qu’on vous laissât la liberté de suivre vos propres inclinations (il n’est pas besoin d’autre punition pour certains esprits), et que la maison ne fût point embarrassée par une personne dont la présence y est d’autant plus fâcheuse, qu’elle a mis tout le monde dans la nécessité de l’éviter. Si vous trouvez, dans tout ce que je viens d’écrire, quelque chose de dur ou de rigoureux, il dépend encore de vous, mais il n’en dépendra peut-être pas toujours, d’y apporter du remède : vous n’avez besoin que d’une parole.

Betty Barnes a ordre de vous obéir, dans tout ce qui pourra s’accorder avec l’obéissance qu’elle doit à ceux auxquels vous en devez comme elle.

James Harlove.

Monsieur,

ce que j’ai à dire uniquement, c’est que vous devez vous féliciter vous-même d’avoir si parfaitement réussi dans toutes vos vues, que vous pouvez à présent faire de moi tous les rapports qu’il vous plaira, et que je ne suis pas plus en état de me défendre que si j’étais morte.

Cependant j’attends de vous une faveur : c’est de ne pas m’attirer plus de rigueurs et de disgrâces qu’il n’en est besoin pour le succès de vos autres desseins, quels qu’ils puissent être, contre votre malheureuse sœur.



Miss Clarisse Harlove, à Miss Howe.

Mardi, 7 mars.

Ma dernière lettre doit vous avoir appris comment je suis traitée, et que votre amie n’est plus qu’une pauvre prisonnière. Nul égard pour ma réputation. Tout le fond de ma cause est à présent devant vous. Croyez-vous qu’on puisse revenir de ces excès de rigueur ? Pour moi, je me persuade qu’on ne pense qu’à tenter la voie de la terreur, pour me faire entrer dans les vues de mon frère. Toute mon espérance est de pouvoir temporiser jusqu’à l’arrivée de mon cousin Morden , qu’on attend bientôt de Florence.

Cependant, s’ils sont résolus d’abréger le tems, je doute qu’il arrive assez tôt pour me sauver. Il paraît clairement, par la lettre de mon frère, que ma mère ne m’a point épargnée dans le rapport qu’elle a fait de nos conférences. D’un autre côté, néanmoins, elle a eu la bonté de m’informer que mon frère avait des vues qu’elle souhaitait que je pusse faire manquer. Mais elle s’était engagée à rendre un compte fidèle de ce qui se passerait entre elle et moi. Elle ne pouvait pas balancer, sans doute, dans le choix d’abandonner une fille, ou de désobliger un mari et toute une famille.

Ils se figurent qu’ils ont tout gagné en congédiant ma pauvre Hannah. Mais aussi long-temps que j’aurai la liberté du jardin et de ma basse-cour, ils se trouveront trompés. J’ai demandé à Betty si elle avait ordre de m’observer et de me suivre, ou si je devais avoir sa permission pour descendre, lorsque je voudrais me promener au jardin et donner à manger à mes bantams ?

Mon dieu, miss ! Vous voulez vous réjouir par cette question. Cependant elle m’a confessé qu’il lui était revenu que je ne devais pas paroître