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les annales des nations : « cherchez l’intérêt !» Oui, ce crime affreux a eu pour mobile l’intérêt, la rapacité sordide. Nous ne nous trompions pas dans nos calculs en soupçonnant que l’intérêt avait inspiré cette barbarie ; et, grâce à Dieu, nous avons réussi à en donner une preuve assez claire et assez nette pour satisfaire même les exigences d’un tribunal ; alors que personne n’avait cependant le droit de nous demander d’établir la vérité, sur un fait vieux de cent quarante ans, avec toute l’exactitude et toute la rigueur prescrites dans les cours de justice.

Il est relativement facile d’écrire l’histoire d’une nation qui compte de longs siècles d’existence, comme la France ou l’Angleterre. Tant de documents font contrepoids aux pièces officielles qu’il suffit presque de citer les sources, de les comparer, de confronter l’un avec l’autre les divers moyens d’information pour se former sur toute chose une opinion : les interprétations, les commentaires deviennent en quelque sorte superflus. Tandis que, dans la question dont il s’agit ici, l’instrument de travail est si ingrat et d’une nature telle qu’il faut le peser consciencieusement, méditer à fond son essence, avoir recours à toutes les subtilités de l’argumentation pour en tirer quelque chose qui ressemble à l’histoire : l’esprit doit faire appel à toutes ses ressources pour en dégager d’irréfutables conclusions. Nous aurions pu nous borner au rôle de compilateur, et, à l’exemple de tant d’autres, copier à droite et à gauche, sans apporter à nos recherches le moindre sens critique, le moindre souci de faire œuvre de vérité. Mieux eut valu alors ne rien écrire du tout. S’il en est qui ont été à même de compulser plus de documents que nous n’avons fait, en revanche nous affirmons que personne ne s’est appliqué autant que nous à faire la critique interne des pièces, offi-