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mation enjoignant aux habitants de prendre les armes contre les Anglais, et leur citant l’extrait suivant de la lettre qu’il avait reçue du gouverneur du Canada :

« Nous nous regardons aujourd’huy Maistre de Beaubassin et des Mines puisque nous en avons chassé les Anglois ; ainsi il ny a aucune difficulté de forcer les Acadiens à prendre les armes pour nous et de les y contraindre ; leur declarons à cet effêt qu’ils sont déchargé du Serment preté, cy-devant, à l’Anglois, auquel ils ne sont plus obligé comme il y a été décidé par nos puissances de Canada et de Monseigneur notre Evesque ». — « En vertu de ceci, continuait Ramesay, nous ordonnons à tous les habitants de Memeramcook de se rendre à cette place (Beaubassin), aussitôt que le signal leur en sera donné par des feux, ou qu’ils découvriront que l’ennemi s’approche ; et cela sous peine de mort, de confiscation de leurs propriétés, de l’incendie de leurs maisons, et de châtiments dignes de rebelles à Sa Majesté le Roi[1]. »

On en conviendra, la pression était immense, et d’autant plus qu’elle s’appuyait sur des sanctions redoutables. Dans cette dernière proclamation, Ramesay, outre son opinion personnelle sur la légitimité de ses prétentions, produisait celle du gouverneur du Canada et même celle de l’Évêque de Québec, Monseigneur de Pontbriand. Tout donc conspirait à faire croire aux Acadiens que la prise de Grand-Pré, et la capitulation signée par les Anglais, les déliaient de leur serment de fidélité à la Grande-Bretagne. Et cependant,

  1. Cette fin de la proclamation de Ramesay n’est pas dans le MS. original. Nous avons cru devoir la citer pour bien montrer dans quelle terrible situation étaient ces pauvres Acadiens, « pris entre deux feux », comme l’a dit très justement Shirley. Cf. A Half-Century of Conflict, vol. ii, p. 202-4. Dans le texte et en note.