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entièrement voués aux intérêts spirituels, ne se mêlent en rien des choses de ce monde, où « n’est pas leur royaume », selon la parole de l’Évangile : ceux-là, on ne va pas les consulter sur les affaires temporelles, dans lesquelles ils ne veulent rien entendre, absorbés qu’ils sont par des soucis supérieurs. D’autres, d’un tempérament moins affiné peut-être ou moins entier, se laissent volontiers aller à donner un avis, quand on le leur demande, touchant des matières profanes : consultés par un petit nombre de personnes, l’opinion qu’ils émettent a plus ou moins de poids, suivant l’importance de la question, et la réputation de sagesse et de prudence qu’ils ont pu acquérir. Il en est d’autres, enfin, mais très rares, qui cherchent à imposer leurs idées sur des choses étrangères à leur mission sacrée, et qui vont jusqu’à faire intervenir, pour le besoin de leur cause, le domaine spirituel ; pareils écarts qui sont, heureusement, peu fréquents, produisent parmi les populations de l’agitation, des murmures, de la zizanie, et, ce qui est plus grave, un refroidissement de l’esprit religieux, une réelle diminution d’influence dans l’ordre surnaturel. Une seule intervention de cette nature, de la part d’un prêtre, est plus remarquée que le silence de vingt autres ; et, à distance des événements où elle a eu lieu, cette exception fâcheuse et solitaire passe facilement, aux yeux des esprits préconçus, pour la règle applicable à tous. Voilà peut-être comment il se fait que Parkman soit entré, à ce propos, dans de telles exagérations de langage. Que l’on ne dise pas que nous voulons, à tout prix, sauver l’honneur du clergé catholique en Acadie. Et d’abord, la conduite de ces admirables missionnaires a toujours été trop noble pour avoir besoin de nos apologies. Notre constatation impartiale repose en premier lieu sur la psychologie : les hommes changent peu, à travers les âges ; et quand, de