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pour s’imaginer qu’ils allaient se soumettre à une conspiration si mal déguisée, et si contraire à leur foi. Il fallait également que le respect des traités, des conventions, des promesses, et de la liberté de conscience fût bien oblitéré chez les vainqueurs, pour oser ourdir une trame d’un caractère aussi odieux. Disons-le toutefois à l’honneur de la Métropole, ces projets iniques, conçus à Annapolis et à Boston, ne reçurent jamais, que nous sachions, le plus faible encouragement à Londres.

Dans ce chapitre, nous ne voulons que définir et apprécier exactement l’attitude du clergé depuis le traité d’Utrecht jusqu’à 1740. Notre seule ambition est de frapper la note juste à son égard, et de mettre dans un relief lumineux le rôle qu’il a joué dans les événements de cette période. Le vrai moyen d’y arriver est de rechercher l’état des esprits à cette époque, et les points sur lesquels pouvait s’exercer l’influence de ce clergé. Les préjugés et le fanatisme ne furent peut-être jamais plus accentués qu’alors. De protestants à catholiques ou de catholiques à protestants, l’on s’injuriait à qui mieux mieux, soit dans la conversation, soit dans des documents de nature privée. Mais l’on est renversé, en parcourant les Archives de la Nouvelle Écosse, de voir que les pièces officielles sont saturées de ces aménités que la simple décence aurait dû en proscrire. Armstrong et ses prédécesseurs, dans leurs dépêches aux Seigneurs du commerce, ne font jamais usage, pour désigner la religion des Acadiens, que des expressions suivantes : « Popists — Popish Superstition — Mass House, etc., etc. » « Que pouvons-nous attendre de ces gens-là ? » écrit-il quelque part, « ce sont des papistes. » Et encore : « Quelle meilleure preuve pourrais-je apporter de leur mauvaise foi ? Ils sont papistes ! »