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y a loin. Et Parkman a montré à quel point les préjugés l’aveuglaient, en profitant de cette occasion pour illustrer sa théorie favorite sur l’influence indue et débilitante du clergé catholique dans l’ordre civil. Les faits sur lesquels il s’appuyait avaient trop peu de consistance et de précision pour servir à une démonstration rigoureuse en cette matière ; et tout ce que l’historien américain a réussi à nous prouver, c’est que le parti pris l’emportait chez lui sur le jugement froid et impartial. Et cela n’est certes pas à son honneur.

Pour insister davantage sur un point qui ne pourrait être élucidé que par de longues et minutieuses recherches, nous conviendrons que la position dans laquelle se trouvaient les prêtres acadiens était extrêmement délicate. Sujets français, ils étaient accrédités comme missionnaires auprès de compatriotes vivant en pays anglais, adjacent aux possessions françaises, et où il était bien impossible que les intérêts propres à ces deux nations ne fussent pas fréquemment en conflit : situation fausse et difficile à laquelle il ne semblait pas y avoir grand remède.

Armstrong songea à remplacer ces prêtres par des missionnaires de langue anglaise. Ce projet était irréalisable : il eut provoqué le départ en bloc des Acadiens. La seule manière de sortir de cette impasse était de créer parmi les Acadiens un clergé national. Les autorités pouvaient raisonnablement leur dire : Nous sommes tenues à honneur de vous accorder le libre exercice de votre religion ; mais, dans votre intérêt et le nôtre, pour régler loyalement une question qui autrement est sans issue, et fertile en dangers, il convient que vos prêtres soient choisis parmi vos enfants : de la sorte, vous aurez des missionnaires qui comprendront et partageront vos obligations. Comme ceci ne peut se faire à