Page:Richard - Acadie, reconstitution d'un chapitre perdu de l'histoire d'Amérique, Tome I, 1916.djvu/246

Cette page a été validée par deux contributeurs.
[ 214 ]

que ce plan honorable serait sacrifié à la volonté étroite et fanatique d’un seul homme.

Lawrence Armstrong, qui succéda à Doucett, en 1725, était loin d’avoir la souplesse de caractère de Philipps : le fond de sa nature était plutôt la grossièreté et la violence. Il était certainement l’homme le moins fait pour gouverner les autres, fût-ce dans les conditions les plus favorables : à plus forte raison était-il impropre à aplanir les difficultés de la situation. Le trait le plus saillant de son humeur était l’instabilité : par moments bienveillant et affable, le plus souvent il se montrait dur et brutal au point de provoquer officiers et soldats à l’insulter publiquement[1]. Le nouveau gouverneur était ce même homme au sujet duquel, dix ans auparavant, Thomas Caulfield avait adressé des plaintes aux Lords du Commerce dans les termes suivants :

« Encore qu’il m’en coûte beaucoup, je me vois obligé de faire connaître à vos Seigneuries les fréquentes indignités, commises par le capitaine Armstrong, de cette garnison, à l’égard de plusieurs des habitants d’ici : dans ma prochaine je vous transmettrai les plaintes et les protestations de ces

  1. « Armstrong était un esprit inquiet, mal équilibré, d’un caractère fantasque, tour à tour bénévole et tyran. Il finit par perdre la tête et se suicida dans un accès de frénésie. » Casgrain. Pèlerinage, etc., c. III, p. 68. « Armstrong, homme violent, d’un esprit grossier et désordonné, qui ne parlait de rien moins que de traverser à main armée la Nouvelle-Écosse et de tout pourfendre, si l’on voulait bien lui envoyer des troupes. » Rameau, Une colonie féodale etc., Tome II, ch. XI, p. 38.

    « On the 22 and 23 Sept., at a Council held in John Adams’ House, in the town of Annapolis, Lt. Gov’r. Armstrong charged his servant, Robert Nicholes, with assaulting him at Canso, in Oct. 1725. » Beamish Murdoch. Hist. of N. S. Vol. I, App. to ch. XLVIII, p. 440. Le même auteur dit (ch. XLVII, p. 422.) que Armstrong fut nommé lt.-gouv. de la Nouvelle-Écosse ou Acadie par lettres patentes du 8 février 1725, et qu’il arriva d’Angleterre à Canso le 29 mai 1725, et de Canso à Annapolis le 17 septembre.