Page:Richard - Acadie, reconstitution d'un chapitre perdu de l'histoire d'Amérique, Tome I, 1916.djvu/172

Cette page a été validée par deux contributeurs.
[ 140 ]

ni emmener leurs bestiaux, etc. ; on les avait seulement laissés libres d’en disposer par la vente. Or, comme ils étaient les seuls habitants du pays, à qui donc auraient-ils vendu ces choses ? Dans ces conditions, dire qu’on leur permettait d’en disposer n’était qu’un vain mot et une fourberie. Cela équivalait à une spoliation de la part de l’autorité. Et quand Akins ajoute que « les Français ne partirent pas parce qu’on ne leur envoya pas, du Cap Breton, les vaisseaux qui leur avaient été promis », ne fausse-t-il pas outrageusement la vérité ? La question même de leur départ ayant été référée à la Reine par Nicholson, celui-ci n’avait donc pas convenu que les Français du Cap Breton viendraient prendre les Acadiens dans leurs propres vaisseaux. Ce renvoi à la Reine fut si peu une fiction que, le 7 novembre 1714, M. de Pontchartrain, ministre de la Marine, faisait tenir à Monsieur d’Iberville, ministre de France à Londres, copie du compte rendu de la mission de MM. de la Ronde et de Pensens à Port-Royal, avec instruction de presser la solution des questions référées par Nicholson à l’autorité royale. Quelques jours après, le 15 novembre 1714, Lord Townshend, secrétaire d’État, soumettait ces questions au Board of Trade[1].

  1. Cf. N. S. doc. Halifax, 1869, pp. 4-5. — La lettre suivante de Pontchartrain à de Costebelle et de Soubras jette un plein jour sur la question qui nous occupe : « J’ai appris avec beaucoup de surprise la manière dure et injuste avec laquelle le général Nicholson a traité les habitants de l’Acadie, et aussi l’opposition qu’il a faite au déménagement de leurs effets et de leurs instruments et à la vente de leurs biens, ce qui était contraire non seulement aux ordres qu’il avait reçus de la feue reine d’Angleterre, mais encore à la convention qui avait été passée entre lui et MM. de la Ronde et de Pensens. J’ai écrit là-dessus à M. d’Iberville, à Londres, de façon qu’il puisse porter des plaintes énergiques devant le Roi d’Angleterre. Je vous en ferai savoir le résultat. Entre temps, il est urgent que vous fassiez tout votre possible pour