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mier alinéa. Si l’on se reporte maintenant à la page 25 du présent ouvrage, on lira ceci : « nous avons abordé cette étude dans un parfait esprit d’impartialité, » qui garde la pensée de l’auteur, mais la rend en un tour conforme au génie de notre langue. Or, pareil cas n’est pas isolé ni accidentel ; il revient, au contraire, avec fréquence, tout au long de l’ouvrage. Et l’on m’a cité l’exclamation de quelqu’un qui avait commencé à lire le manuscrit : « Mais, c’est de l’anglais, cela ! »

Ce n’est certes pas qu’Édouard Richard n’ait su la langue maternelle. Il avait fait de fortes études classiques au séminaire de Nicolet ; puis, un premier séjour à Paris l’avait mis au courant du mouvement littéraire contemporain ; il y avait pris contact avec les meilleurs représentants de la pensée européenne. Il en avait profité pour lire beaucoup ; et il était revenu de France avec toute une bibliothèque, où les grands classiques du dix-septième et du dix-huitième siècles voisinaient avec les auteurs modernes. Mais c’est à l’Université McGill qu’il termina ses études de droit. Et McGill est un milieu anglais. Peu d’années après qu’il eut été reçu avocat et qu’il eut exercé sa profession à Arthabaska, en société avec celui qui demeura toujours son plus grand ami, — Sir Wilfrid Laurier, — il alla s’établir dans cet Ouest canadien, dont il aura été l’un des premiers à entrevoir et à prédire l’avenir. Là, soit dans ses relations officielles, soit dans la vie ordinaire, il n’eut guère à se servir que de la langue anglaise, et cela pendant longtemps. Rien d’étonnant dès lors qu’à sa mentalité, restée au fond si