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deux, quand l’Angleterre aura transformé ses vastes colonies en de puissants empires ? Que ces colonies deviennent ou non indépendantes, elles auront servi à répandre au loin l’influence et le prestige britanniques et auront rapporté à la mère-patrie des avantages de toute nature.

Ce n’est pourtant pas à l’infécondité de la race qu’il faut attribuer l’insuccès de la colonisation française en Amérique. Car la prodigieuse expansion des Acadiens et des Canadiens, expansion qui n’a peut-être été égalée que par celle des Boers, montre au contraire que la race française est admirablement prolifique. Cet insuccès, il faut en chercher la cause dans les calculs erronés du gouvernement : il n’entrait pas dans les vues de ce dernier de renforcer les établissements qu’il avait fondés par l’envoi de nombreux contingents. Sans doute craignait-on que la Métropole ne se trouvât affaiblie si on laissait l’émigration se diriger vers le Canada. Il semble que les intérêts commerciaux étaient les seuls que l’on eût en vue et que l’on ne se préoccupât pas d’autre chose que de recueillir des bénéfices matériels immédiats. Quant à faire des sacrifices pour assurer l’avenir de ces vastes domaines où tout était à développer, et où les « possibilités » étaient en quelque sorte infinies, cela n’entrait pas en ligne de compte.

D’ailleurs, il est fort probable que les hommes d’État anglais n’ont pas prévu, beaucoup mieux que ceux de France, l’avenir que leur réservaient leurs colonies. Il ne faudrait pas dire qu’ils ont procédé, dans la création et le développement de celles-ci, en vertu d’un ordre d’idées sagement préconçues, qu’ils ont été mus par des desseins longuement mûris. Sous ce rapport, le gouvernement anglais ne fut ni plus actif ni plus clairvoyant que le gouvernement français. Il est vrai que l’émigration vers les colonies anglaises fut, dès