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arrivée, jetés ça et là au sein de communes à qui leur religion était odieuse, privés de tous leurs biens sans qu’aucune compensation leur eût été offerte, — il est tout naturel que leurs souffrances aient servi d’inspiration au poète et au romancier. Les Acadiens ont été les victimes de leur propre erreur, non moins que des mensongères aspirations que de faux amis avaient semées dans leur esprit ; et les soubresauts de l’ambition nationale et de la jalousie ont précipité leur destin. Il nous est cependant doux de savoir que, dans les années qui ont suivi ces événements, un grand nombre de ces exilés revinrent dans leur terre natale, où, bien qu’ils ne fussent pas rentrés en possession de leurs fermes, ils sont devenus partie intégrante et respectée de notre population, donnant sous les divers régimes l’exemple de ces vertus simples dont ils avaient hérité, se distinguant par ces mêmes dispositions modestes, humbles et paisibles qui avaient toujours brillé en leurs pères[1]. »

Comment ne pas estimer un tel homme dont les défauts, s’il en eût, venaient de l’excès même de ses qualités ? Il pousse même le scrupule jusqu’à nous dire qu’il compte des ancêtres parmi les conseillers de Lawrence, comme s’il se fût cru obligé à cet aveu, afin de mettre le lecteur en garde contre la partialité possible de ses jugements. Néanmoins, et malgré le respect sans bornes qu’il nous inspire, nous ne pouvons nous empêcher de remarquer que cette extrême indulgence, pour tout et pour tous, conduit souvent à fausser l’histoire et à la rendre méconnaissable. Il est permis de douter que Murdoch possédât la sagacité pénétrante d’un Brown et d’un Haliburton : ceux-ci avaient toute la bien

  1. Ibid. ch. XX. ad fin. p. 298-9.