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Ce n’est qu’en poursuivant nos recherches aux sources officielles, et en étudiant de plus près sa manière de procéder, que nous avons pu nous former la ferme conviction que cet ouvrage est une imposture, que la vérité historique y est défigurée. Parkman a fait de la duperie un système ; et il est facile à quiconque observe attentivement sa manière de saisir les artifices de langage sous lesquels cette duperie se cache. L’un des moyens de tromper dont il se sert souvent, — et il en a d’autres plus odieux que nous avons déjà signalés, — consiste à vouloir créer dans l’esprit du lecteur une impression nette et définie, alors que lui-même reste dans le vague et l’indéfini, et qu’il paraît toucher la question avec une candide impartialité. Ainsi, quand il dit : « les uns firent ceci, les autres cela, et le reste rien du tout[1], » ou qu’il emploie des termes équivalant à ces expressions, il faut se méfier ; car presque toujours il y a là-dessous un piège. Il est resté dans l’indéterminé, mais son but est atteint ; le lecteur emporte une impression définie, quoique vague encore, que, sur la question dont il parle, il y a eu division en trois parties à peu près égales. En réalité, Parkman peut être intéressé à procéder de la sorte, mais la division qu’il donne n’a rien qui, de près ou de loin, ressemble à la vérité des choses.

Par tempérament, Parkman était à égale distance de l’historien et du romancier : il lui manquait l’exquise sensibilité nécessaire à celui-ci ; la bienveillance, l’élévation de caractère, l’amour du vrai nécessaires à celui-là. Ne voulant pas rester simple conteur, — comme tel cependant il pouvait se faire une réputation durable, — il a préféré s’élever à

  1. Cf. notre tome I, ch. XI, p. 338, note 32 renvoi à Montcalm and Wolfe, vol, I, c. IV, P. 96.