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s’assembler cette automne pour reconnoître S. M. Britannique & recevoir les presens qu’elle leur envoye — Pour ceux de L’Isle Royale Je n’eus point de leurs Nouvelles, Je n’ai rien à faire avec eux — et Je suis persuadé que les Sauvages n’ont ni assez d’Esprit ni assez de bêtise pour se mêler de leur chef des Affairs qui ne les regardent en aucune façon. D’ou vient donc Monsieur que Depuis l’Evacuation de Louisbourg tout est si changé ? Vous savez ce qui est arrivé a Canso — Vous Aurez entendu ce qu’ils viennent entreprendre a Chinectou, Monsieur Je croirois vous dire la plus grande Injure de vous en soupçonner la cause, mais J’ai toute la Raison du mond[e] de presumer que quelqu’uns qui sont venus avec vous en sont les auteurs.

J’ai eté informé qu’un François est venu de Louisbourg & a passé par cette Province. Je scais qu’un certain Pretre nommé Leutre [sic pour Le Loutre] est depuis quelque tems avec les Sauvages & qu’il étoit à Chinectou quand ils attaquèrent les Vaisseaux Anglois — comme cette homme es venu de France dans la Chabanne il depend de votre Gouvernement.

Vous me permettrez de vous demander s’il est entré dans cette Province avec votre permission ou contre vos ordres. En tout cas Je vous prie de la rappeler et de faire examiner sa Conduite. Les Pretres doivent savoir qu’il leur est défendu d’entrer dans cette Province sans avoir obtenu ma permission. Vous pouvez conter que ceux qui viendront de votre part seront bien receus et protegés, ma résolution étant de laisser aux Sujets François de S. M. Brit. aussi bien qu’aux Sauvages l’exercice libre de leur Religion mais pour ceux qui presumeront officier dans ces Provinces sans m’avoir présenté une lettre de la part de V. E. ou de M. Jonquiere, Je fairai executer les Loix qui les regardent. Je fairai tout mon possible pour que ceux qui doivent diriger les Consciences des autres soient eux mêmes honnêtes hommes. Les Missionnaires se vantent qu’ils ont converti les Sauvages de ces Pais, si c’est être Chretien que de commettre toutes sortes de Crimes de Vols et d’Assassinats il vaudroit mieux qu’ils fussent Restés toujours Sauvages Payens. Un Sauvage honnête homme vaux dix mille Chretiens Fourbes.

Monsr depuis que Je scais que les Sauvages se sont retirés a St-Pierre dans l’Isle Royale avec le vaisseau Anglois qu’ils prirent a Canso, c’est mon devoir de vous en demander la restitution. Et Je ne doute nullement que, V. E. ne me le faira renvoyer au plutôt. Au moins si qui que ce soit, alloit mener un Voisseau François dans un Port de la Nouvelle Écosse, Je croirois mon Gouvernement bien foible ou bien lâche si Je ne vous le renvoyois sur le Champ, & meme je me croirois obligé de punir ceux qui l’avoient pris en Corsaires, ou de vous les livrer pour être punis a votre Gré. À L’égard des menaces de vos Sauvages, vous voyez que Je ne les soupçonne pas sans l’entervention de quelques François Malintentionnés et Grâces au Dieu nous Sommes à l’Abri de toutes leurs Entreprises.

Je suis avec le plus sincère Estime, etc.